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17 janvier 2013

L’acte III de la décentralisation : un enjeu majeur


"La France a eu besoin de la centralisation pour se faire. Elle a besoin de la décentralisation pour ne pas se défaire." François Mitterrand, 1982.

Alors que s’ouvre une année décisive pour notre pays, l’un des nombreux chantiers engagés par le gouvernement de François Hollande et Jean-Marc Ayrault concerne la réforme des collectivités à travers un nouvel acte de la décentralisation. Lors de ses vœux la Ministre de la Réforme de l’Etat et de la Décentralisation, Marylise Lebranchu en donnait le sens : « Trente ans après, la décentralisation est toujours aussi nécessaire car, chacun le sent bien, c’est de la mobilisation commune de l’Etat et des collectivités locales que viendra la solution à la crise économique que traverse notre pays. Soutien des PME, formation des jeunes, logement, enseignement supérieur, recherche, culture, environnement, écologie : c’est ensemble, Etat et collectivités, que nous serons à la hauteur des attentes des Français pour relever ces défis. »


Les grandes lois de décentralisation de 1982 et 1983 ont changé la France. Elles ont libéré les collectivités de la tutelle de l’Etat. Elles ont surtout permis d’inventer de nouvelles politiques publiques, de mieux répondre aux besoins de la population et de donner aux élus les responsabilités qu’ils attendaient depuis des décennies. Mais le monde et la France ont changé. Asphyxiées financièrement sous la Droite, les collectivités doivent évoluer et continuer à créer de nouveaux outils au service des citoyens et du développement de notre pays. Au moment où il faut redresser la France, où il faut chercher des gisements pour l’investissement, pour la formation, pour l’innovation, c’est sur les territoires que nous les trouverons.

Le Gouvernement prépare en ce moment même un projet de loi. Sa priorité est d’aller jusqu’au bout de la logique des blocs de compétences sur certains sujets  :

  • Aux régions les compétences économiques et de formation professionnelle. Est reconnue aux Régions le rôle de stratège économique, qui leur permettra d’exister au niveau européen et mondial.
  • Aux départements, une mission renforcée de garant de la solidarité entre les hommes et de la cohésion des territoires, dans tous les domaines, et pas seulement dans le domaine social. Collectivité phare en matière de solidarités et de proximité, le Département consolide ainsi son rôle central en terme d’aménagement du territoire
  • Au bloc communal, la responsabilité de mettre en oeuvre la transition énergétique avec le logement, l’urbanisme et les mobilités.
  • Le texte consacre aussi l’émergence d’une nouvelle réalité institutionnelle, les métropoles Les propositions contenues dans le projet de loi donneront les moyens à nos plus grandes aires urbaines de jouer un rôle moteur décuplé sur la scène nationale et internationale.

La méthode : l’objectif prioritaire n’est pas de transférer aux collectivités des compétences dont elles ne veulent pas ou qu’elles ne peuvent pas assumer. Il est d’abord de clarifier les compétences et simplifier les procédures avec un double objectif : restaurer la confiance et garantir le service au citoyen.
Le principal levier de ce projet de loi, ce n’est pas le transfert, mais le contrat.
Le texte prévoira que les collectivités locales, entre elles et avec l’Etat, déterminent librement les modalités d’exercice de leurs compétences :
  • au niveau national, au sein du Haut Conseil des territoires, véritable instance de concertation et de négociation entre l’Etat et les collectivités.
  • au niveau local via les conférences territoriales de l’action publique : les communes, les régions, les départements mais aussi les intercommunalités y seront représentées, en présence du représentant de l’Etat, pour déterminer l’organisation des compétences la plus appropriée à la réalité de nos territoires.

Il s’agit de permettre aux collectivités et à l’Etat de discuter tous les 5 ans compétence par compétence des modalités concrètes d’exercice, dans le respect du principe de non tutelle d’une collectivité sur l’autre.
Par voie de conséquence, le texte prévoie aussi le rétablissement de la clause générale de compétence pour les régions et les départements.

Tout cela ne peut bien sûr se faire sans repenser les moyens financiers des collectivités et restaurer l’autonomie des ressources des collectivités locales, mises à mal par des transferts de compétences non compensés et une réforme de la TP et de la fiscalité locale qui a privé les collectivités de toute autonomie fiscale.

La réforme doit comporter un volet sur la restauration de l’autonomie fiscale des Régions, et la garantie de ressources pérennes et suffisantes permettant aux Départements de faire face au financement des trois allocations individuelles de solidarité (RSA, APA, Prestation Compensatoire du Handicap) dont la loi leur confie la charge. Ce chantier de la fiscalité locale sera ouvert dès cette année pour une application en 2014.

Autre enjeu de taille, la péréquation : il ne peut y avoir de décentralisation sans une politique vigoureuse d’égalité des territoires. Organiser des transferts de ressources des territoires les plus riches vers les territoires les plus pauvres est une nécessité si l’on veut éviter de voir sombrer une partie de nos collectivités et les populations qui les habitent.
L’Etat doit rester le garant de cette justice entre les citoyens, et c’est à lui que doit revenir la lourde charge de faire en sorte que la liberté des territoires et la diversité des politiques ne se solde pas par un creusement des inégalités.

L’année 2013 sera décisive pour les collectivités. Dotées de nouveaux moyens d’action, confortées dans leurs missions qui seront plus lisibles pour les citoyens, elles joueront un rôle moteur dans la reprise économique et dans la modernisation de l’action publique. Il ne faut pas rater le rendez-vous de la réforme de la décentralisation !

Vincent Rabillard
Délégué fédéral à la décentralisation 

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