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06 février 2009

Séance exceptionnelle au Département.

Vous trouverez ci aprés le discours de Didier Marie président du Département de Seine Maritime lors de la séance exceptionnelle du vendredi 6 février 2009.

Depuis quelques mois, nous abordons par petites touches la question de la réforme institutionnelle.
Le calendrier de celle-ci se précise, et j’ai pensé, avec mes collègues présidents, qu’il était utile de faire entendre la voix et les réflexions des Conseils Généraux à un moment clé du débat.
Depuis quelques mois, différents groupes dans différentes structures et institutions mènent la réflexion et font des propositions :
- la mission d’information de l’Assemblée Nationale, celle du Sénat,
- les associations d’Elus,
- les groupes parlementaires de la majorité, les partis politiques.

Le tout donnant parfois un sentiment de flou voire de cacophonie.
Parallèlement, le Président de la République a institué, le comité pour la réforme des collectivités locales, présidé par M. Balladur, qui doit fin février faire les propositions qui constitueront le socle de la réforme.
Les travaux de ce comité sont arrivés à un tournant, les auditions publiques sont terminées et les membres s’engagent maintenant dans la phase de réflexion devant déboucher sur les propositions.
L’ADF quant à elle, a réuni le 17 décembre les 102 présidents de Conseils Généraux et arrêté à l’unanimité, transcendant les attaches partisanes, une plateforme commune, dans la continuité des résolutions adoptées elles-aussi à l’unanimité lors de son congrès d’Orléans.
La délibération qui vous sera proposée dans quelques instants en est l’expression. De nombreux départements l’ont déjà adoptée ou vont le faire aujourd’hui ou dans les jours qui viennent.
Il m’ait apparu important que notre Département, le cinquième de par sa taille et le sixième de par son budget, puisse s’exprimer et nourrisse en toute transparence la réflexion.
Important de le faire maintenant plutôt que d’attendre les conclusions du comité Balladur et de réagir.
Les auditions sont closes, mais l’expression des départements peut encore être entendue, c’est la raison de cette session extraordinaire.
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Je voudrais en entrant dans le vif du sujet, tout d’abord balayer l’argument que personne ne développe, mais soyons prudents, que nous ne voulions pas de réforme, que nous serions archaïques, que nous prônions l’immobilisme.
Il n’en est rien.
L’ADF veut une réforme, une réforme utile pour nos concitoyens, efficace pour nos
collectivités.
Nous avons besoin de simplification, de clarification, de lisibilité tant pour ce qui est des compétences des uns et des autres, que des modes de financements de nos collectivités.
Notre séance aujourd’hui n’a pas pour objet de proposer une réforme, mais de rappeler la légitimité et l’utilité des départements, et les principes autour desquels nous souhaitons que la réforme prenne en compte la spécificité de nos collectivités départementales.
La légitimité d’abord :
Le nouveau cycle de débat sur les institutions a été inauguré il y a un an avec la remise du rapport de la commission pour la libération de la croissance française (23 janvier 2008) qui préconisait dans sa décision 260 de faire disparaître en dix ans l’échelon départemental.
Tout indiquerait aujourd’hui que cette remise en cause n’est plus à l’ordre du jour, mais à y regarder de plus près, de nombreuses suggestions, réflexions pourraient réactiver cette idée, que ce soit par l’émergence de métropoles qui prendraient les compétences des départements, des projets de fusion départements – régions, ou de cantonnement des départements au simple rôle de guichet social, devenant alors prescripteurs des solidarités nationales comme une CAF ou un CCAS.

Permettez-moi donc de rappeler que l’histoire des départements est ancrée dans le patrimoine de notre République, créé par le décret du 22 septembre 1789 et les lois des 26 février et 4 mars 1790, reconnues en 1871 avec l’introduction de l’élection démocratique du Conseil Général, de nouveau conforté avec les lois de décentralisation, y compris l’acte II d’Août 2004 qui leur a consacré une nouvelle légitimité en leur allouant l’essentiel des nouvelles compétences transférées, légitimité historique, mais aussi légitimité territoriale.
Notre histoire ancienne et récente nous place au coeur de l’organisation territoriale de la République.
La décentralisation en a fait la pierre angulaire en plaçant le Département au point
d’équilibre entre proximité et vision large. La spécificité de notre institution au-delà de nos compétences propres réside dans notre capacité à établir le lien entre les espaces urbains et ruraux et à assurer les solidarités territoriales et sociales.
L’utilité quant à elle, est évidente. Nous la manifestons quotidiennement par notre proximité avec la population, nos réponses sociales, le partenariat avec les acteurs économiques, sociaux et les élus des communes et intercommunalités.
Le Département, c’est d’abord un maillage incomparable du territoire en terme de service public de proximité, une capacité à innover, imaginer des réponses appropriées à la spécificité de chaque territoire, une capacité décuplée depuis la décentralisation et autorisée par la clause de compétence générale qui nous permet d’intervenir auprès de l’ensemble de nos partenaires communs dans tous les domaines de la vie quotidienne.
Le Département est plus que jamais le socle des solidarités sociales et territoriales.
Sans lui, quelle solidarité avec les plus fragiles, quelle solidarité avec le monde rural, avec les communes, les quartiers sensibles. Quel avenir pour la proximité culturelle.
Quelle place pour le sport pour tous, quel soutien pour le monde associatif.
Certes, on pourrait nous dire : « d’autres sauraient le faire ».
Mais pourquoi remettre en cause ce qui marche et qui c’est construit dans la durée.
Alors que demandons-nous ?
J’emploie comme dessein le « nous » car comme je le disais préalablement l’initiative de ce jour est collective.
Elle est issue des travaux de l’ADF et vous constaterez tant dans mes propos que
dans le corps de la délibération, la volonté de dépasser les clivages, les attitudes partisanes pour ne privilégier que l’intérêt général, qu’à mes yeux représente les départements.
1 – le premier principe, c’est la reconnaissance du rôle du département, acteur des solidarités
sociales, qui couvre l’ensemble des situations nécessitant une intervention des politiques publiques dans la vie des familles et des personnes, et acteur des solidarités territoriales qui garantissent un aménagement équilibré et durable du territoire.
2 – La nécessité pour remplir cette tâche de conserver aux côtés des communes la clause de compétence générale.
Oui à la clarification des compétences.
Oui à la définition de blocs cohérents et homogènes, à la désignation de chefs de file
, mais laissons aux départements cette souplesse, cette faculté d’adoption, cette boîte à outils permettant la diversité d’intervention et la proximité qu’est la clause de compétence générale.
3- Oui à la clarification des financements, mais cela nécessite l’élaboration d’un nouveau pacte financier avec l’Etat et donc une réforme fiscale.
Les départements, mais plus largement, l’ensemble des associations d’élus ADF/AMF/ARF, dans leur diversité demande que l’on prenne comme référence le rapport « Valletoux » du conseil économique et social.
Nous souhaitons disposer d’un véritable panier d’impôts au sein duquel
demeurait un impôt économique.
Nous sommes aussi unanimes pour réclamer l’affectation d’une part d’impôt national, la CSG par exemple, qui correspond au financement de nos politiques de solidarité.
Nous revendiquons l’autonomie financière et fiscale garantissant le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales.
Enfin nous demandons que les conseillers généraux restent élus au suffrage universel direct sur la base de territoire de proximité, en une seule fois, tous les six ans, pour garantir la lisibilité et la cohérence de l’action de la collectivité.
Voilà mes chers collègues, le cadre dans lequel notre débat peut se développer.
Je souhaite, en cette période difficile pour nos concitoyens, où le besoin de stabilité, de solidarité et de sécurité s’exprime encore plus fortement, que l’on ne casse pas ce qui marche, mais qu’au contraire l’on profite du débat ouvert pour conforter la décentralisation qui depuis 1983 a montré son efficience, pour conforter la place des départements, pivot des solidarités territoriales et sociales.

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